Être le petit nouveau du groupe; guide pour accompagner mon enfant ou mon adolescent à relever le défi.

3 à 17 ans
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Peur, résistance, confrontations; pour certains enfants et adolescents, être le nouveau ou la nouvelle peut engendrer de vives réactions. Comment aider mon enfant ou mon ado à faire face à ses peurs? Comment l’accompagner dans le processus d’adaptation?

Le changement fait peur

C’est bien connu, pour un adulte, changer de travail et s’adapter à un nouveau milieu est stressant. Mais si nous avons appris dès le plus jeune âge à faire face à nos peurs et à composer avec le fait d’être le nouveau ou la nouvelle dans un groupe, les moments transitoires de notre vie seront vécus beaucoup plus sereinement. La psychologue Marie Andersen, auteure de L’Art de se gâcher la vie (Ixelles Éditions, 2012), souligne l’importance de notre éducation en ce domaine : « Oser marcher sur un territoire non balisé, cela s’apprend dès l’enfance, pas à pas. Mais si on nous en a préservés, ou si l’on nous a fait comprendre que cet inconnu était source de danger, il restera pour nous un obstacle démesuré. »

Séparation des parents, déménagement, fin d’une étape; les enfants sont souvent confrontés à devoir intégrer des nouveaux groupes et bien que certains d’entre eux composent assez bien avec la nouveauté, d’autres ont besoin de plus d’encadrement. La psychologue pour enfants, Suzanne Vallières, nous explique pourquoi : « Les enfants qui ont une bonne confiance en soi, une bonne estime personnelle et une bonne image corporelle auront beaucoup moins de difficultés à s’intégrer. Par ailleurs, les enfants qui ont vécu des difficultés relationnelles dans le passé avec des amis vont avoir plus de difficulté à se faire un réseau.

L’école c’est un milieu social avant tout. C’est bien d’être bon en mathématique et en français, mais si l’enfant se retrouve toujours seul aux récréations ou au dîner, son parcours scolaire risque d’être assez difficile. »

Changer d’école; choisir le bon moment

Changer d’école est un événement marquant pour l’enfant. Faire face à un nouvel enseignant, de nouveaux camarades, une nouvelle classe tout en apprivoisant de nouvelles consignes et de nouveaux règlements sont des agents stresseurs. Suzanne Vallières insiste sur l’importance de choisir le bon moment : « Il arrive, durant le parcours scolaire d’un enfant, qu’il doive changer d’école. Idéalement, nous devrions attendre la fin de l’année scolaire ou au moins la fin d’une étape pour effectuer le changement. Il est plus difficile pour l’enfant de s’adapter à toutes ces nouveautés alors que tous ses camarades vaquent à leurs activités avec aisance. Si le changement se fait à la rentrée, il ne sera pas le seul nouveau ; ils seront 2 ou 3 élèves dans la même situation et il se sentira moins seul. De plus, en septembre, tous les enfants ont changé de professeur, les “gangs” se sont dispersés. »

Le plus inquiétant pour un jeune quand il intègre un nouveau groupe c’est de savoir s’il se fera des amis.

Mais si le changement d’école doit s’effectuer au printemps, préparer la transition en amont est crucial. « Avant la première journée d’école, le parent devrait contacter la direction et l’enseignant. e pour organiser une visite des lieux. L’enfant pourra ainsi se familiariser avec son nouvel environnement. Il découvrira sa classe, son pupitre, la cour d’école, etc., poursuit la psychologue. Elle ajoute : « Les enfants accepteront plus facilement d’intégrer un nouveau milieu s’ils peuvent y rattacher des images. Faire la route vers l’école avec l’enfant à pied ou en voiture le sécurisera. Les enfants de moins de 10 ans ont besoin de beaucoup de repères visuels pour comprendre. Les images les aideront à apprivoiser le changement », conclut-elle.

Elle poursuit : « Afin d’amortir le choc de la première journée, le parent pourrait même demander que l’enfant aille passer une demi-journée dans la classe pour rencontrer les futurs camarades. Cette démarche donne le temps à toutes les parties de s’adapter au fait d’intégrer un nouvel élève qui peut causer une désorganisation temporaire au sein du groupe. » Elle explique : « Certains élèves peuvent avoir la crainte de perdre leurs amis; ils peuvent avoir peur que le nouveau prenne leur place; c’est l’attrait de la nouveauté. De plus, l’enseignant.e va lui porter un peu plus d’attention au début et c’est normal. Qui plus est, intégrer un nouveau dans la classe peut changer la dynamique de groupe. Si de vingt-six élèves ils passent à vingt-sept, un chiffre impair, ce sera plus compliqué de faire des équipes, par exemple. »

Comment savoir si mon enfant est stressé ?

Le stress afflige tant les adultes que les enfants et si ce stress n’est pas désamorcé dès le début, il peut se transformer en troubles anxieux. Selon le Centre d’études sur le stress humain du CHU Sainte-Justine, 10 % des enfants souffrent de troubles anxieux au Québec. De ce nombre, 6% des cas sont suffisamment graves pour nécessiter un traitement.

Mais avant d’en arriver là, il faut être attentif aux signes annonciateurs de stress. La psychologue pour enfants met en garde : « Avant ou après un changement important, il se peut que l’on voie apparaître des comportements inhabituels chez l’enfant. Les enfants de moins de 10 ans vont exprimer leur malaise surtout par des comportements. Il est très rare qu’un enfant dise qu’il est stressé ou anxieux; il faut être attentif aux signes.

Trouble du sommeil, colères injustifiées, hyperactivité, irritabilité sont quelques-uns des symptômes qui nécessitent l’intervention du parent. Il faut faire preuve d’empathie; c’est comme si nous, comme adultes, nous changions de patron, de collègues et d’environnement», conclut-elle.

Quel est le bon moment pour emmener mon enfant à verbaliser ?

La psychologue développe: si ces comportements sont récurrents, il faut intervenir. Je recommande aux parents d’emmener l’enfant à l’extérieur prendre un chocolat chaud ou manger une bouchée. Il est préférable d’aborder le problème un samedi matin, à tête reposée.

Il ne faut surtout pas essayer de raisonner l’enfant le soir avant qu’il aille au lit ou pendant la nuit s’il se réveille.

Dans ce contexte, il sera beaucoup moins réceptif aux solutions que le parent proposera. L’enfant, s’il est anxieux, risque de contrecarrer toutes les solutions présentées.

Quelle technique dois-je utiliser pour faire parler mon enfant en difficulté ?

« Il faut utiliser la technique du “Je” pour communiquer et lui parler comme si “nous le savions déjà”, dit Suzanne Vallières.

Voici un exemple:

  • J’ai l’impression que depuis que tu es dans cette nouvelle école tu dors moins bien… Ce sont tes pensées qui te réveillent ?
  • Oui, je pense au lendemain.
  • Quand tu dis que tu penses au lendemain, tu penses à quoi ? À la classe ? Aux amis ?
  • Je me demande si ça va bien aller et si quelqu’un va vouloir jouer avec moi.
  • Nomme-moi un ami avec qui tu aimerais jouer. Aimerais-tu qu’on l’invite à la maison ?

Il est important que l’enfant tisse des liens à l’extérieur de l’école pour donner une chance à la relation de se poursuivre aux récréations et aux heures de dîner. À partir du moment où l’enfant exprime ses craintes, il faut lui proposer des solutions. Si c’est possible, on peut lui offrir d’aller le chercher un peu plus tôt à la fin des classes afin qu’il n’ait pas à passer quelques heures au service de garde. Nous pouvons utiliser cette stratégie le temps qu’il s’adapte. N’oublions pas que le processus d’adaptation est énergivore. Avoir à s’adapter toute la journée en classe en plus de passer quelques heures au service de garde, c’est beaucoup demander à l’enfant.

Garder des liens avec son passé et en créer des nouveaux

Encourager l’enfant à tisser de nouveaux liens est important, mais l’inciter à garder contact avec les amis qu’il a déjà est aussi une bonne façon de l’aider à garder une certaine stabilité. Suzanne Vallières explique : « Comme parent, on a tendance à banaliser et à croire qu’aussitôt que l’enfant va arriver à l’école il sera facile pour lui de se faire de nouveaux amis, mais ce n’est pas aussi simple. Garder un lien avec les amis existants est important quand c’est possible. »

Utiliser des rencontres Skype est un excellent moyen de préserver les liens qu’il a avec un ami proche. Si la distance le permet, on peut également prendre un engagement envers l’enfant en lui disant qu’il pourra continuer à inviter Cloé à la maison, par exemple.

Mon enfant va joindre une nouvelle équipe de soccer, l’été prochain. Comment puis-je l’aider à bien s’intégrer ?

Intégrer un nouveau groupe, peu importe sa nature, peut engendrer de la crainte; c’est la peur de l’inconnu. Il est essentiel selon, Suzanne Vallières, de dire à son enfant qu’il ne sera pas seul, que nous allons l’accompagner lors de sa première journée au soccer, de son premier cours de ballet ou de natation, par exemple.

Avant l’âge de 12 ans, les parents devraient accompagner l’enfant et le présenter à l’adulte responsable de l’activité. Du reste, qu’il s’agisse d’un adolescent ou d’un enfant, il est important de rassurer l’enfant inquiet. Elle ajoute qu’il est important de le rassurer par rapport au fait qu’il ait des craintes. L’enfant a besoin de savoir qu’il n’est pas hors normes et qu’il est normal qu’il ait peur de ne pas être bien accueilli par le groupe.

Mon enfant veut abandonner son équipe de hockey après la première pratique. Qu’est-ce que je fais ?

L’épreuve de la « première fois » peut provoquer de fortes émotions. Il arrive même que certains enfants inventent toutes sortes de prétextes pour abandonner l’activité. La psychologue suggère d’appliquer la règle de trois.

Si l’enfant veut abandonner après une ou deux rencontres, on peut suggérer qu’il essaie d’aller à son activité 3 fois avant de prendre la décision.

Le parent peut assister aux pratiques afin d’observer l’enfant et la façon qu’il interagit avec ses coéquipiers et vice et versa. Il sera ainsi plus en mesure d’évaluer si son enfant est réellement malheureux au sein du groupe ou s’il est en réaction face à ses craintes.

Mon adolescent revient de son atelier d’improvisation préoccupé. Comment puis-je l’emmener à parler ?

« Les adolescents qui ont de la difficulté à s’intégrer à un groupe peuvent devenir anxieux et cette anxiété peut les mener à faire de l’évitement. Ils diront qu’ils n’aiment plus leur atelier d’impro ou ils trouveront des défaites pour manquer des cours. Les aborder en frappant à la porte de leur chambre n’est peut-être pas la meilleure approche », selon la psychologue. Elle propose plutôt d’utiliser la technique de la communication en parallèle: « La communication en parallèle se fait dans la voiture, au cinéma, dans le remonte pente en ski ou dans n’importe quelle situation qui nous place côte à côte. Le fait de ne pas être face à face est moins confrontant pour l’adolescent et il s’ouvrira plus facilement. Elle ajoute: il faut rester disponible. »

« Peu importe ce que nous faisons au moment où notre ado veut nous parler, il faut s’arrêter et prendre le temps de l’écouter, sinon, on risque de manquer l’occasion de communiquer avec lui. »

Comment l’aider à traverser cette période d’adaptation tout en encourageant son autonomie ?

L’adolescence est une période sensible durant laquelle l’adolescent désire s’émanciper de ses parents et acquérir de l’indépendance. Pas évident de l’accompagner et de l’encourager à devenir plus autonome tout en l’épaulant. Suzanne Vallières précise : « Encourager l’adolescent à aller lui-même rencontrer l’adulte responsable de l’activité afin de se présenter et lui expliquer qu’il est nerveux parce qu’il ne connait personne dans le groupe est une bonne façon de l’accompagner. L’enseignant ou le coach pourra ensuite présenter le nouveau au groupe. Le rôle d’intermédiaire que joue le parent auprès des plus jeunes est transféré au professeur de théâtre. »

Savoir reconnaître les signes de détresse chez son enfant, l’écouter, l’épauler et le guider l’aidera à transcender ses craintes et fera de lui un d’adulte mieux outillé à faire face au mal qui nous affecte tous : la peur de l’inconnu.

“Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements.”

– Charles Darwin

En résumé

Les signes que notre enfant s’adapte mal au changement

  • Difficulté à trouver le sommeil
  • Réveil nocturne
  • Hyperactivité
  • Hypersensibilité
  • Irritabilité
  • Crises inhabituelles
  • Colère sans raison apparente

La communication avec un enfant de moins de 12 ans

  • Utiliser le JE quand je communique et verbaliser ce que je perçois comme étant ses craintes.
  • Proposer des solutions dès que l’enfant exprime son souci.
  • Sécuriser l’enfant en normalisant ses craintes.

La communication avec un adolescent

  • Rester disponible en tout temps.
  • Utiliser la technique de la communication parallèle (côte à côte).
  • Éviter d’aller frapper à la porte de sa chambre pour parler.
  • Encourager son autonomie tout en l’épaulant.

À retenir

  • Accompagner l’enfant dans sa démarche pour se faire des nouveaux amis.
  • Choisir un lieu neutre et le bon moment pour initier le dialogue.
  • Garder contact avec les amis existants.
  • Encourager l’enfant à participer à l’activité au moins 3 fois.
  • Prendre le temps d’écouter son ado en tout temps.

— Dernière mise à jour: 24 août 2023

Biographie

Rédactrice en chef

Journaliste à la recherche depuis plus de 15 ans, Danielle Dutrisac a travaillé pour plusieurs grands médias du Québec (Québecor publications, Radio-Canada, TVA, V Télé, 98,5 ). Curieuse de nature, son parcours l’a menée à explorer plusieurs avenues qui ont nourri son sens de l’aventure et son appétit pour ce qui la passionne: l’humain. Poser des questions, écouter, comprendre et transmettre le message, voilà ce qui nourrit le quotidien de celle qui a fait des études en adaptation scolaire à l’université. Bienveillante et attentionnée, la journaliste n’a qu’un seul objectif: aider les autres à mieux vivre. Crédit photo: Marili Clark

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