Dyslexie et dysorthographie : comment les diagnostiquer?
- Par
- Audrey Cauchon, orthophoniste
La dyslexie et la dysorthographie sont deux des troubles d’apprentissage les plus courants. En quoi consistent-ils et quelles en sont les causes?
Qu’est-ce que la dyslexie et la dysorthographie?
Les difficultés à lire et à écrire touchent un bon nombre d’élèves. La problématique la plus courante qui affecte la lecture et l’écriture est la dyslexie-dysorthographie : un trouble spécifique d’apprentissage relié à l’identification des mots écrits (dyslexie) et à l’acquisition de l’orthographe (dysorthographie). Il est possible qu’un enfant soit dyslexique-dysorthographique ou dysorthographique seulement.
Même si l’enfant peut faire des progrès, il s’agit de difficultés durables. Aussi, il n’est pas possible d’expliquer l’ampleur des difficultés de l’enfant par d’autres sources de difficultés scolaires : un milieu défavorisé, un déficit sensoriel (problème de vision ou d’audition), un problème psychoaffectif ou un problème physiologique (exemple : problème de sommeil). Évidemment, si l’enfant dyslexique-dysorthographique présente d’autres sources de difficultés scolaires en plus de son trouble spécifique d’apprentissage, ses difficultés seront plus grandes.
Troubles associés
Il arrive aussi très souvent que l’enfant dyslexique-dysorthographique ait un autre trouble associé, comme la dysgraphie, la dysphasie, un déficit d’attention (TDAH), la dyscalculie, etc., ce qui encore une fois peut contribuer à exacerber les difficultés de l’enfant.
La dyslexie-dysorthographie résulterait d’un fonctionnement différent du cerveau. Autrement dit, nous ne pouvons pas nous en rendre compte quand l’enfant est un bébé, mais ce trouble est pourtant présent depuis le tout début de la vie. À l’origine de la dyslexie-dysorthographie, trois déficits sont possibles : le déficit phonologique, le déficit visuo-attentionnel et le déficit mnésique. Le tableau ci-dessous résume les caractéristiques de chacun.
Déficits et leurs effets
- L’enfant a particulièrement de la difficulté à lire ou à écrire des non-mots. Il fait des erreurs avec les sons autant en lecture qu’en écriture.
- L’enfant éprouve des difficultés avec les activités de conscience phonologique à la maternelle :
- compter le nombre de syllabes d’un mot;
- séparer un mot en syllabes;
- coller des syllabes pour faire un mot;
- reconnaître des mots qui riment, puis coller des sons pour faire un mot;
- séparer un mot en sons;
- déterminer la position d’un son dans un mot.
Il est recommandé de commencer le travail des habiletés à jouer avec les sons à partir de la deuxième moitié de la maternelle. Il est aussi important de noter que le développement de ces habiletés se poursuivra en 1re année.
- L’enfant fait des inversions ou des omissions.
Exemples
li pour il
frou pour four
tou pour trou
- L’enfant fait des confusions auditives lors des activités de conscience phonologique, en lecture et en écriture, et ces confusions persistent dans le temps.
- p/b
- t/d
- c/g
- f/v
- s/z
- ch/j
- a/an
- o/on
- …
Exemples
pouton pour bouton
panta pour panda
carage pour garage
félo pour vélo
sèbre pour zèbre
nache pour nage
patalon pour pantalon
melo pour melon
- L’enfant a des difficultés à lire tous les types de mots : les non-mots et les mots. Les difficultés de l’enfant sont plus prononcées en lecture. La lecture est donc très lente. En revanche, l’enfant peut être capable d’écrire des non-mots.
- En lecture, l’attention visuelle de l’enfant ne serait pas capable de traiter en même temps toutes les lettres du mot écrit. Autrement dit, c’est comme si l’enfant voyait quelques lettres du mot seulement.Exemples
menton → menton → menton
mon → mon
- L’enfant a un retard sur le plan de l’orthographe lexicale, car les mots qu’il voit en lecture ne sont pas stables.
- Il ne respecte pas la frontière des mots en écriture.Exemples
Ma ma man a une mo to. - Il peut faire des confusions visuelles : l’enfant substitue des lettres qui se ressemblent visuellement, comme b/d, p/q, u/n, on/ou, etc.Exemples
don pour bon
- Les difficultés de l’enfant sont plus prononcées en écriture.
- L’enfant peut avoir des difficultés à lire les mots irréguliers. Il prononce les lettres muettes.Exemples
Au-tomme-ne pour automne
Porque pour porc - L’enfant éprouve beaucoup de difficulté à orthographier les mots. Malgré l’étude assidue des mots à la maison, il n’arrive pas à se souvenir, à plus long terme, de l’orthographe des mots déjà appris.Exemples
mèzon pour maison anfen pour enfantL’enfant peut réussir à se souvenir des mots pour sa dictée de la semaine, mais n’est plus capable par la suite. Il peut même avoir de la difficulté à orthographier son nom. - Il ne respecte pas la frontière des mots en écriture.Exemples
Gé me dé siné. - Il peut faire des confusions visuelles : l’enfant substitue des lettres qui se ressemblent visuellement, comme b/d, p/q, u/n, on/ou, etc.Exemples
don pour bon
Le déficit phonologique (déficit touchant les sons) se manifestera chez l’enfant par des confusions auditives en lecture et en écriture : p/b, t/d, c/g, f/v, s/z, ch/j, m/n, gn/ni, è/in, a/an, o/on, etc.
Le déficit visuo-attentionnel, quant à lui, se manifeste chez l’enfant par des difficultés à tenir compte de toutes les lettres du mot écrit en lecture. Quand il lit, l’enfant ne voit pas toujours les mots de la même façon. Il rencontre donc d’importantes difficultés à lire et c’est aussi difficile pour lui d’orthographier les mots, car les modèles de mots écrits ne sont pas stables. L’enfant qui présente un déficit visuo-attentionnel sera ainsi plus sensible à la grosseur ou à la police des caractères.
Finalement, le déficit mnésique (déficit de la mémoire lexicale orthographique) se manifeste surtout chez l’enfant par des difficultés à orthographier les mots : mèson (maison), anfen (enfant). L’enfant a une forte tendance à oublier l’orthographe des mots déjà appris.
Un enfant peut présenter un de ces trois déficits ou plus d’un déficit. Le trouble d’apprentissage sera alors qualifié de « mixte ». Il est aussi important de noter que les déficits peuvent engendrer des signes similaires. Par exemple, les confusions visuelles (b/d, p/q, m/n, u/n, t/f, e/a, ou/on, etc.) peuvent aussi être notées chez les enfants qui présentent un déficit visuo-attentionnel ou mnésique.
Surveiller les manifestations
Bien que la problématique soit présente chez l’enfant dès la naissance, les signes de dyslexique-dysorthographie apparaissent le plus souvent lors des premières années à l’école. Il est certain que les difficultés se manifesteront plus tôt chez un enfant qui présente un ou des déficits plus importants. Les premiers signes apparaissent lors des ateliers de littératie à la maternelle, incluant bien souvent des activités de conscience phonologiques et de sons et lettres. Il est aussi important d’être attentif à d’autres signes : est-ce que l’enfant peut écrire son prénom et reconnaître les prénoms de ses petits copains? Les signes de dyslexie-dysorthographie sont souvent présents dès le 1er cycle du primaire (1re année, 2e année).
Malheureusement, il arrive que la dyslexie-dysorthographie soit décelée plus tardivement au primaire, voire au secondaire. Les enseignants, les orthopédagogues et les parents sont les personnes qui côtoient le plus l’enfant au quotidien. Ainsi, ils ont un rôle important d’alerte lorsqu’ils doutent d’une problématique de lecture ou d’écriture chez un enfant.
À retenir
- La dyslexie est un trouble d’apprentissage relié à l’identification des mots écrits, et la dysorthographie, à l’acquisition de l’orthographe.
- L’enfant dyslexique-dysorthographique peut présenter un autre trouble associé.
- Trois déficits sont à l’origine de la dyslexie et de la dysorthographie : le déficit phonologique, le déficit visuo-attentionnel et le déficit mnésique.
- La dyslexie et la dysorthographies sont présentes dès la naissance, mais les premiers signes apparaissent lors des ateliers de littératie à la maternelle.
— Dernière mise à jour: 9 mars 2017